ZFE : 50 députés défendent une proposition de loi sur la suspension des zones à faibles émissions

Cela ne s’arrête plus. Les zones à faibles émissions (ZFE) sont dans l’oeil du cyclone. Depuis que l’écrivain Alexandre Jardin a créé le hashtag #Gueux, dénonçant le caractère injuste de la mise en place des zones dans les villes de plus de 150.000 habitants, et appelant à se mobiliser pour défendre le droit de circuler librement, les pouvoirs publics commencent à ouvrir les yeux. Pourtant dès l’été 2021, la Ligue de défense des conducteurs démontrait déjà, dans une étude intitulée « ZFE, la grande cacophonie », que les restrictions de circulation dans les zones menaçaient de se transformer en machines à écarter des grandes villes les Français les plus démunis.

Fracture géographique et sociale

La situation est potentiellement explosive. Aujourd’hui, comme le rappelle la Ligue de défense des conducteurs, plus de 11 millions de conducteurs, possédant un véhicule à vignette Crit’Air 3 ou plus, c’est-à-dire immatriculé avant 2006 (essence) ou 2011 (diesel) ne peuvent plus circuler dans les ZFE mises en place par les métropoles de Paris, Lyon, Grenoble et Montpellier. Dans celles moins restrictives de Marseille, Reims, Rouen ou Strasbourg, ils sont tout de même déjà 3,7 millions. Ce serait la double peine pour les automobilistes au budget les plus contraints : être exclus et se voir condamnés à régler une contravention pour avoir circulé dans l’une de ces zones. Selon le calcul effectué début 2025 par l’association des conducteurs, près d’un demi-million de salariés pourraient perdre leur emploi faute de pouvoir changer leur véhicule âgé pour contre un modèle plus récent.

L’écrivain a souligné, à juste titre, que cette exclusion programmée créait une fracture géographique, sociale et même politique. Les ZFE illustrent cette France à double vitesse qui, en 2018, avait fait éclater sa colère lors de la crise des «gilets jaunes». À l’époque déjà, la voiture était au centre de la révolte en raison de la hausse des carburants et de la baisse de la limitation de vitesse à 80 km/h sur le réseau secondaire.

Face au risque social et économique que fait courir l’instauration d’une interdiction progressive de circuler des véhicules les plus anciens, Sylvie Bonnet, la députée de la quatrième circonscription de la Loire, et Alexandre Portier, député de la 9e circonscription du Rhône, ont annoncé lors d’une conférence de presse mardi 25 mars, leur décision de déposer une proposition de loi demandant l’instauration d’un moratoire de cinq années pour l’entrée en application des ZFE. Cette période serait mise à profit pour trouver des solutions réalistes et acceptables pour tous. Soutenue par la Ligue de défense des conducteurs, cette proposition de loi est surtout cosignée par cinquante députés issus, phénomène rare, de cinq groupes politiques (Droite Républicaine, Les Démocrates, LIOT, Horizons et Ensemble pour la République). C’est bien la preuve que cette proposition de loi, pleine de bon sens selon ses défenseurs, dépasse les clivages politiques. La Ligue de défense des conducteurs a déjà enregistré 300.000 signatures pour demander la suspension.