Après 20 années de fouilles, le métro de Thessalonique s’élance au milieu des trésors archéologiques
Thessalonique, deuxième ville de Grèce, inaugure samedi son métro après deux décennies d'atermoiements dus notamment à d'importantes découvertes archéologiques, témoins de la longue histoire de cette cité pendant la période hellénistique, puis sous les empires romain et byzantin. « Tout est prêt. Après de nombreuses années, nous remettons aux citoyens la principale ligne de métro de Thessalonique », a déclaré à l'AFP le ministre des Transports, Christos Staikouras, lors d'un essai vendredi.
La ligne de métro automatique - fourni par la branche italienne du constructeur japonais Hitachi Rail - doit transporter environ 250 000 passagers par jour, dans cette métropole du nord de la Grèce qui compte plus d'un million d'habitants. Dans certaines stations, des vitrines exposeront une sélection des 300 000 objets découverts pendant les travaux.
« Nombreux obstacles et difficultés »
Fondée au IVe siècle avant J.-C. et nommée en l'honneur de la demi-sœur d'Alexandre le Grand, Thessalonique était un centre important de l'Empire romain avant de devenir la deuxième ville de l'Empire byzantin après Constantinople. La ville a continué à croître sous l'Empire ottoman avec l'arrivée au XVe siècle de milliers de Juifs séfarades expulsés d'Espagne. L'essentiel de sa communauté juive a été exterminé par les nazis.
Le métro « est un projet qui était attendu depuis longtemps. Il a rencontré de très nombreux obstacles et difficultés », a reconnu le ministre. La première ligne longue de 9,6 km a été construite sur l'ancienne avenue romaine qui traversait autrefois la ville et le long de laquelle ont été découverts des vestiges archéologiques. La mise à jour des antiquités, dont certaines ont ensuite été restituées pour être intégrées aux nouvelles stations, a coûté 203 millions d'euros.
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3 milliards d’euros
Il s'agit du deuxième métro construit en Grèce après celui d'Athènes, inauguré en 2000. Son exploitation et sa maintenance sont assurées par la société Thema, qui comprend l'italienne ATM (la société des transports publics de Milan) et l'entreprise d'ingénierie française Egis. Cette ligne et une extension encore en construction à l'est de la ville vont coûter 3 milliards d'euros.
Le logo du nouveau réseau a suscité une controverse ces dernières semaines : l'appel d'offres a grimpé de 8 000 à 30 000 euros avant d'être directement attribué à une petite entreprise d'Athènes. Décidé en 2003, le métro de Thessalonique devait initialement être terminé en 2012. Mais les entreprises qui ont participé à la construction ont fait faillite pendant la crise financière qui a secoué la Grèce.
Des commerces ont fermé à cause du chantier
La gestion des antiquités mises à jour durant les fouilles a également fait l'objet de plusieurs poursuites judiciaires. Des « trésors » ont été découverts durant les travaux : 50 000 pièces de monnaie, deux places en marbre, une fontaine de 15 mètres de haut, une église chrétienne des premiers siècles... Des couronnes et des bijoux en or ont également été retrouvés dans plus de 5 000 tombes au point que le ministère grec de la Culture a vu dans la construction de ce métro la plus grande fouille de sauvetage jamais réalisée dans le pays.
« Après tant d’années, de nombreux commerces ont fermé le long de l’avenue principale Egnatia, le trafic commercial a diminué en raison des chantiers »
Anastasia Polychronidou, employée d’un magasin
À la station Agia Sofia, des couches de fragments sont exposées de l'époque hellénistique à l'époque moderne. « Toute la période de l'histoire de Thessalonique peut être racontée sur ce mur », commente Nikos Denis, directeur adjoint d'Elliniko Metro, la société publique qui a développé ce transport en commun.
Pour autant, ce métro suscite un certain scepticisme parmi les habitants, dont beaucoup ont été affectés par les longs travaux dans leur ville. « Après tant d'années, de nombreux commerces ont fermé le long de l'avenue principale Egnatia, le trafic commercial a diminué en raison des chantiers », confie à l'AFP Anastasia Polychronidou, une employée d'un magasin âgée de 36 ans. « À chaque fois que nous entendions une nouvelle date prévue pour l'achèvement du projet, nous n'y croyions plus, ajoute-t-elle. Ce projet est devenu une blague dans la ville ! » Une extension du métro vers l'aéroport Makedonia, le troisième de Grèce situé à 13 kilomètres du centre-ville, est dans les cartons, mais elle n'ouvrira pas avant 2040.