Voir ou revoir six films majeurs d'Yves Boisset, décédé ce lundi, cinéaste engagé, politique et polémique

Scénariste de 33 de ses 37 films, réalisés entre 1968 et 2009, Yves Boisset se partage entre scripts originaux et adaptations d’auteurs comme Jean-Patrick Manchette (Folle à tuer) ou Michel Déon (Un taxi mauve). Parmi cette richesse filmique aujourd’hui un peu (trop) oublié, retour sur six films d’un auteur qui a marqué les années 1970 et 80, avec des comédiens et comédiennes tels que Charlotte Rampling, Marlène Jobert, Miou-Miou, Jean Carmet, Philippe Noiret, Patrick Dewaere, même Fred Astaire !

L'Attentat (1972)

L’Attentat (1972), avec Jean-Louis Trintignant, Jean Seberg, Michel Piccoli, Gian Maria Volonte, Michel Bouquet, Philippe Noiret et en guest-star américaine Roy Scheider, rassemble un casting comme on n’en fait plus. Thriller politique, L’Attentat voit un leader populaire du tiers-monde (Gian Maria Volonté) se réfugier en Suisse suite à la menace de plusieurs dirigeants qui dépêchent à ses trousses pour le tuer.

Boisset demande notamment à Jorge Semprún l’écriture des dialogues d’un film inspiré de l’affaire Ben Barka, opposant de gauche marocain enlevé et tué à Paris, avec la complicité de policiers et des services secrets français. L’Attentat illustre comme cinquième film d’Yves Boisset la veine politique d’un cinéaste engagé.

Dupont Lajoie (1975)

Dupont Lajoie (1975) voit un des comédiens préférés d’Yves Boisset, Jean Carmet, incarné un beauf en vacances dans un camping du sud de la France qui se sert du racisme de ses congénères. Un des rôles majeurs de Jean Carmet dirigé à contre-emploi en le sortant des rôles de comédie dans lesquels il a beaucoup œuvré. Film au sujet sociétal s’agissant du racisme "ordinaire ", Dupont Lajoie est considéré par la critique comme un des meilleurs films sur le sujet.

Boisset est aidé dans ce sens par un Jean Carmet remarquable dans son rôle d’ignoble salaud manipulateur et violeur. À noter la présence auprès de Jean Carmet, Pierre Tornaden Jean Bouise et Jean-Pierre Marielle, celle d’Isabelle Huppert dans le rôle de la victime du vacancier.

Le Juge Fayard dit le Shériff (1977)

Le Juge Fayard dit le Shériff (1977), avec Patrick Dewaere dans le rôle-titre, Aurore Clément et Philippe Léotard, entre-autres, voit le réalisateur et son acteur principal au faîte de leur carrière. Comme pour L’Attentat, Yves Boisset s’inspire de faits réels, ici l’assassinat du juge Renaud en 1975 à Lyon, premier magistrat assassiné en France depuis l’Occupation.

Le film fait scandale et polémique, Yves Boisset se voyant lui-même menacé. Thriller alliant polar et justice et politique, adhérant à une veine courante dans les années 70, où un juge ivre de justice, risque sa vie pour faire éclater la vérité autour d’un hold-up où seraient impliqués des notables, donnant aussi au fait divers la dimension d’une affaire d’Etat. Tout Boisset.

Un taxi mauve (1977)

Un taxi mauve (1977) rassemble un étonnant casting international : Charlotte Rampling, Philippe Noiret, Peter Ustinov et Fred Astaire qui n’a jamais cessé de tourner depuis 1933 jusqu’en 1985. Le film, adapté d’un roman sort de la veine habituelle d’Yves Boisset, dans ses adaptations d’histoires vraies, sociétales ou politico-judiciaires.

Situé en Irlande, le film voit l’arrivée de Sharon (Charlotte Rampling) qui bouleverse la nonchalance de la vie villageoise, en fait parsemée de non-dits, jusqu’à ce que débarque un mystérieux Taubleman (Peter Ustinov) qui semble connaître tout de chacun des habitants. Le film a quelque chose d’intimiste mais de foncièrement troublant dans les mystères dont semblent habités tous les protagonistes.

Allons z'enfants (1981)

Allons z’enfants (1981), avec Jean-Pierre Aumont, Lucas Belvaux et Jean Carmet, est adapté d’un roman d’Yves Gibeau. Allons’z’enfant est considéré comme un des meilleurs film d’Yves Boisset par les critiques et est son film préféré. Son succès ne fut cependant au rendez-vous.

Situé dans une école militaire dans l’entre-deux-guerres, il voit l’un des enfants de troupe, Simon (Lucas Belvaux), insoumis à l’autorité militaire, devenir le souffre-douleur de tout le régiment. Toujours engagé et fiévreux, Yves Boisset jette un regard virulent sur l’univers militaire, avec des interprètes de grande classe.

Canicule (1984)

Canicule (1984), où l’on retrouve Miou-Miou, Victor Lanoux, et l’éternel Jean Carmet, voit une guest-star américaine de grande classe en Lee Marvin, un habitué du polar d’outre-Atlantique. Ce dernier interprète un gangster poursuivi par la police après un hold-up, qui trouve refuge auprès d’un couple quelque peu abruti dans une ferme de la Beauce.

Très bien accueilli par la critique, Canicule bénéficie de dialogues signés Michel Audiard, qui servent une intrigue bourrée de cynisme aux confins de la cruauté et parfois violent.