Plus vrai que nature: le trompe-l’œil en majesté au musée Marmottan-Monet
Cet article est issu du Figaro Magazine
Trompeuses apparences… Connu dans le monde entier pour sa collection exceptionnelle de Monet, le Musée Marmottan sait varier les plaisirs. La preuve avec la magnifique exposition «Le Trompe-l’œil de 1520 à nos jours» *, qui compte des œuvres issues de grandes institutions françaises et internationales (National Gallery of Art de Washington, château de Fontainebleau, Louvre…), mais aussi des trésors méconnus provenant de son fonds.
«La famille Marmottan a légué à l’Académie des beaux-arts sept œuvres illusionnistes: trois signées par certains des plus éminents maîtres de ce genre, tels que Cornelis Norbertus Gysbrechts, Laurent Dabos et Louis Léopold Boilly, et quatre attribuées à Piat Joseph Sauvage», explique Érik Desmazières, le directeur des lieux. Des pièces de choix qui ont fait l’objet d’une restauration ou d’un toilettage, et qui figurent à nouveau en excellente place dans l’enceinte. «Certaines d’entre elles sont présentées pour la première fois depuis des décennies, à l’occasion de cet hommage aux fondateurs», confie Sylvie Carlier, directrice des collections, qui a réuni, avec Aurélie Gavoille, un ensemble composé de 80 tableaux.
Sommets d’ingéniosité
Première interrogation: d’où vient le terme «trompe- l’œil»? Réponse des expertes: «Il aurait été employé pour la première fois par Louis Léopold Boilly en légende d’une œuvre exposée au Salon de 1800.Il fut adapté trente-cinq ans plus tard par l’Académie française. Bien qu’il apparaisse au XIXe siècle, son origine serait liée à Pline l’Ancien, qui rapporte dans son Histoire naturelle comment le peintre Zeuxis avait représenté des raisins si parfaits que des oiseaux vinrent voleter autour.» Vient le rappel des règles très strictes entourant l’exécution de ces travaux, comme le respect de l’échelle et la nécessité pour chaque objet de donner l’illusion de pouvoir être attrapé par la main. Tout un art! «Notre ambition était de montrer que le trompe-l’œil va au-delà de la nature morte, poursuit Sylvie Carlier. Son autre singularité? L’humour, qui court de siècle en siècle.»
La visite donne un bel aperçu de l’imagination débordante des amateurs d’effets d’optique (vanités, trophées de chasse, porte-lettres…). Des créations en céramique complètent le tout, ainsi que des bas-reliefs architecturaux. Séduit aussi la sélection des artistes (Nicolas de Largillière, Cristoforo Munari, Jean-Baptiste Oudry…). Parmi les rois de la discipline, toutes générations confondues? Cornelis Norbertus Gysbrechts, peintre de la cour de Copenhague, dont les compositions ont atteint, au XVIIe siècle, des sommets d’ingéniosité. Sans oublier ses successeurs comme Boilly et ses pairs, dont on admire les compositions en noir et blanc, proches de la gravure.
Minutieusement décrite au fil des salles, l’histoire du trompe-l’œil suscite la curiosité. «Un art mineur», clama souvent la critique. Un genre tombé dans un relatif oubli dans la deuxième moitié du XIXe siècle, mais redevenu à la mode aux États-Unis. Place à des concepteurs qui s’approprient alors des objets du quotidien issus de la culture américaine! Les surréalistes s’engouffrent dans la brèche.
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Retour en grâce, qui se prolonge au fil du temps. Une exposition, intitulée «Le Triomphe du trompe- l’œil», a même lieu en 1993, au Grand Palais, sous la houlette de Jacques Poirier et Pierre Ducordeau. Au Musée Marmottan, un modèle appuyé contre une cloison fait son petit effet. Il s’agit de Jade, une représentation hyperréaliste conçue par Daniel Firman. Une présence plus vraie que nature, là encore.
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