Rénovation de logements, numérique, simplification des aides… Ce que préconise la Caisse des dépôts pour transformer la protection de l’enfance

La protection de l’enfance est au bord de l’asphyxie. En octobre dernier, le Conseil économique, social et environnemental (CESE) sonnait déjà l’alerte. Dans un rapport, il dénonçait des « défaillances » dans le système et exhortait l’État à agir sans tarder pour la protection de 400 000 jeunes. En réponse, la Caisse des dépôts a formulé vingt propositions visant à soulager un secteur sous pression.

« La sécurité des enfants est d’avoir un toit »

« La sécurité des enfants est d’avoir un toit », insiste Olivier Sichel, directeur intérimaire de la Caisse des dépôts. Entre 1996 et 2022, le nombre d’enfants pris en charge par l’Aide sociale à l’enfance (ASE) a explosé, enregistrant une hausse de 46 %. Résultat : à la fin novembre 2023, 3 335 mineurs, pourtant déclarés en danger et retirés de leurs familles sur décision judiciaire, n’ont trouvé ni foyer ni famille d’accueil pour les héberger.

La saturation est telle que trois juges de l’enfance sur quatre renoncent désormais à prononcer des placements, faute de places disponibles. « Pour y remédier, on a une enveloppe de 350 millions d’euros qui permettra de créer et rénover les places », a annoncé le représentant de la Caisse des dépôts.

Réinventer l’accompagnement des jeunes par le numérique

« Trop de jeunes suivis par l’aide sociale à l’enfance ignorent leurs droits », déplore l’auteur du rapport. Pour remédier à cette situation, l’une des propositions phares est la création d’une application mobile dédiée aux jeunes suivis par l’ASE. « Elle centralisera des informations pratiques, de l’obtention de la carte vitale à l’accès au logement social, en passant par le permis de conduire », précise-t-il.

Le rapport met également l’accent sur la nécessité d’investir dans le numérique pour moderniser la formation des professionnels. Mais, insiste Catherine Vautrin, « il ne s’agit pas de remplacer l’humain ».

Face à la pénurie de travailleurs sociaux et d’accompagnateurs, le rapport recommande d’intensifier les investissements dans la formation continue et de dynamiser l’offre de stages. Selon une enquête de l’UNIOPSS, le taux de postes vacants dans les structures de protection de l’enfance atteint 9 %, soit deux fois plus que dans le secteur sanitaire, social et médico-social.

Des inquiétudes persistantes

« Le champ des possibles est désormais ouvert », affirme Catherine Vautrin, ministre des Solidarités, alors que se clôt le cycle de propositions sur la protection de l’enfance. Mais au-delà des avancées, des voix s’élèvent : « Je suis très inquiète, le Val-de-Marne traverse une situation qui nous dépasse », déclare Marie-Christine Segui, vice-présidente chargée de la protection de l’enfance et de la jeunesse du département. Selon elle, le territoire peine déjà à rembourser ses associations partenaires. « Toutes ces propositions sont excellentes, mais les mettre en œuvre s’avère compliqué », conclut-elle.

De son côté, Catherine Vautrin reconnaît que la gestion des départements reste un défi « particulier », notamment en raison de leurs contraintes budgétaires. Pourtant, l’absence de majorité absolue et le manque de projets de financement clairs, notamment pour la sécurité sociale, compliquent encore la tâche. « Mais cela ne nous empêche pas de penser à ce projet », assure-t-elle.

Les jeunes majeurs sortant du système de protection de l’enfance restent une grande inquiétude. « À 21 ans, on vous demande de vous débrouiller, mais ces jeunes ont une chance sur quatre de finir à la rue. Il est crucial de les aider », insiste un ancien mineur protégé. Pour Catherine Vautrin, « des progrès significatifs ont été réalisés », mais elle reconnaît qu’il est « essentiel d’approfondir l’analyse de cette phase de transition » dans les propositions du rapport.

Il ne reste plus qu’à concrétiser cette annonce avec la création du Haut-commissariat à l’enfance, promis par le président de la république, mais dont les contours devraient être définis d’ici la fin du mois.

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