Tortures physiques, psychologiques, viols, agressions sexuelles… Narges Mohammadi, prix Nobel de la paix, alerte sur la situation effroyable dans les prisons d’Iran

Il y a près de deux ans et demi, Jina Mahsa Amini, 22 ans, mourrait, sous les coups de matraques de la police des mœurs, à Téhéran. Un évènement qui a déclenché colère et indignation dans tout le pays, provoquant le mouvement de protestation « Femme, Vie, Liberté ». Ces contestations ont d’ailleurs remis en cause le régime lui-même.

L’une des figures de ce mouvement, Narges Mohammadi, le prix Nobel de la paix 2023, s’est exprimée, ce jeudi 23 janvier, dans un discours en visioconférence depuis Téhéran devant la délégation aux droits des femmes du Sénat et de l’Assemblée nationale française. Celle qui s’est présentée comme « une militante de la société civile » a dénoncé « l’apartheid de genre » en Iran, en précisant que lutter contre celui-ci n’avait pas « pour objectif unique de libérer les femmes de l’asservissement et de la soumission » mais que c’était aussi un moyen d’« ouvrir la voie à la démocratie, à la paix, et à la liberté ».

Témoin « d’agressions sexuelles », et de « harcèlement sexuel »

La militante des droits humains et des droits des femmes maintes fois condamnée et emprisonnée depuis 25 ans pour son engagement contre le voile obligatoire pour les femmes et contre la peine de mort en Iran, avait pu sortir temporairement de prison pour raisons médicales, au début du mois de décembre 2024.

Narges Mohammadi a ainsi évoqué le sujet de son incarcération dans la prison d’Evin, évoquant avoir été notamment retenue dans les cellules d’isolement. Elle a assuré, avoir été « témoin d’agressions sexuelles, ainsi que de harcèlement sexuel » de la part des autorités en prison. Elle a également évoqué « l’enfermement des femmes contestataires dans les établissements et hôpitaux psychiatriques ».

D’ailleurs, lors de l’arrestation d’Ahou Daryaei, l’étudiante iranienne arrêtée après s’être dévêtue en public devant une université à Téhéran, les autorités avaient prétendu qu’elle avait des problèmes psychiatriques. « L’étudiante en question souffre d’une fragilité psychologique et a été transférée en ambulance des services d’urgence sociale à un centre de soins spécialisés » avaient ainsi déclaré les autorités. Narges Mohammadi avait soutenu l’étudiante et affirmé qu’elle avait « transformé son corps en symbole de dissidence », réclamant « sa libération et la fin du harcèlement des femmes » en Iran.

« Ces endroits sont utilisés pour mater la dissidence »

En outre, la militante des droits humains et des droits des femmes a également évoqué des « cellules d’isolement », inconnues du reste du public. « Dans la prison d’Evin, j’ai entendu un certain nombre de témoignages de femmes qui n’étaient pas retenues dans les prisons officielles » a-t-elle poursuivi.

Narges Mohammadi détaille également que des femmes ont rapporté avoir « été retenues dans des voitures extrêmement longtemps », ou bien des endroits qu’elles ne connaissaient pas. « Ces endroits sont utilisés pour mater la dissidence » a-t-elle dénoncé, ajoutant que les autorités de la République Islamique d’Iran menaient ainsi « leur torture physique ou psychologique de manière cachée ».

« Notamment après le mouvement Femmes Vie Liberté, j’ai eu accès à de nombreux témoignages de femmes qui se présentaient avec des bleus sur tout le corps (…) » a expliqué Narges Mohammadi. « J’ai rencontré une femme qui avait de tels bleus sur le visage qu’on n’était même pas en mesure de la reconnaître » a-t-elle ajouté.

La militante a également expliqué avoir entendu le témoignage de femmes militantes de droits des étudiants. Elle a détaillé le témoignage, en particulier, d’une femme victime d’« agression sexuelle et de viol au sein de la voiture qui la transportait » jusqu’à son lieu d’emprisonnement.

Des informations « extrêmement inquiétantes » sur l’état physique et mental de Cécile Kohler

« Nous avons été arrêtées, jetées dans des cellules, incarcérées. Nous avons perdu nos emplois, nos enfants, nos vies. De nombreuses femmes, anonymes, oubliées, sous l’oppression et la discrimination systémique ont péri » a-t-elle poursuivi.

Narges Mohammadi s’est également exprimée sur les informations qu’elle avait au sujet de Cécile Kohler, l’enseignante française de 40 ans, arrêtée le 7 mai 2022 en Iran avec son compagnon Jacques Paris à la prison d’Evin. La militante a partagé les mêmes conditions de détention que Cécile Kohler à la prison d’Evin. Elle a indiqué que celle-ci était « encore dans le quartier de haute sécurité du service de renseignement de la République Islamique ». « Les informations que j’ai sont extrêmement inquiétantes » a-t-elle assuré, expliquant qu’il s’agissait autant de son « état physique » que de son « état mental ».

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