Pourquoi le monde de la mode attend avec autant d’impatience le défilé Chanel de Matthieu Blazy?

Voilà plus d’un an que sévit le mercato des directeurs artistiques dans les maisons parisiennes. Après tant de rumeurs et de bruit, c’est la Fashion Week de la libération avec onze premières collections de nouveaux directeurs artistiques dont Demna chez GucciJonathan Anderson chez Dior ou encore, Duran Lantink chez Jean Paul Gaultier. Autant de bonnes surprises et quelques déceptions, mais tout est évidemment à relativiser, une vision créative ne s’arrête pas à un premier défilé. C’est d’ailleurs depuis des mois, ce que n’a cessé de clamer Bruno Pavlovsky, le président des activités mode de Chanel, au sujet de la collection de Matthieu Blazy qui sera présentée ce soir au Grand Palais: si elle ouvre un nouveau chapitre, elle n’en est que le premier paragraphe, d’autant que le directeur artistique a déjà commencé sa collection des Métiers d’art (début décembre à New York), probablement la couture (en janvier à Paris), et pensé à son prochain prêt-à-porter (en mars) qui sera suivi de la Croisière (en mai), etc.

Matthieu Blazy dans les rues de Milan en 2024 Claudio Lavenia / Getty Images

D’ailleurs, contrairement aux concurrents, la maison s’est montrée particulièrement discrète depuis quelques semaines. Ainsi, alors qu’Anderson a dévoilé ses premières créations pour Dior à la Mostra de Venise, les robes de Chanel sur le tapis rouge du festival n’étaient pas créditées Blazy. De même, quand Gucci prenait les réseaux sociaux par surprise en diffusant les images de sa collection zéro pour la marque florentine le matin même de la présentation officielle, aucune silhouette du nouveau Chanel n’a été divulguée sur Instagram. Seul teasing concédé, de superbes images de David Bailey égrainées sur les réseaux sociaux: une femme coiffée au carré prise de dos comme une allégorie de Coco, une chemise brodée Chanel dans une housse à logo, une maison miniature toute blanche estampillée du double C, et une bergère sur laquelle ont été posés des vêtements d’homme. Pas de tweed, ni de camélia ou de sac matelassé qui furent les codes mis en avant par Karl Lagerfeld lorsqu’il reprit une marque moribonde dix ans après la disparition de Mademoiselle.

Les vêtements d’homme sur la bergère, évocation des débuts de Coco Chanel qui a détourné le vestiaire masculin d’abord pour elle-même puis pour ses contemporaines. David Bailey pour Chanel
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Si les attentes sont aussi importantes, c’est que la maison occupe une place à part dans l’histoire de la mode, par l’avant-gardisme de sa fondatrice et le Zeitgeist de Karl Lagerfeld qui en a fait un phénomène culturel. Ajoutez à ça l’aura de Matthieu Blazy qui est un des designers les plus intéressants de ces dernières années tout en étant assez «neuf» puisqu’il n’a été sous les feux des projecteurs qu’entre 2021 et 2024 durant son règne chez Bottega Veneta. Cerise sous le gâteau, alors que le calendrier des défilés a été complètement chamboulé cette saison, c’est Chanel qui occupe le dernier soir de cette Fashion Week, passant après l’hystérie collective qui a animé Milan et cette dernière semaine à Paris. Reste que, si les planètes semblent alignées pour ce premier défilé, il faut encore que la magie opère... Verdict, ce soir.