Le dénouement est proche. À une semaine du Congrès des Républicains (LR), qui désignera les 17 et 18 mai prochains le nouveau président du parti, les deux candidats en lice - Bruno Retailleau et Laurent Wauquiez - jettent leurs dernières forces dans la bataille. Interviews, meetings, déplacements... Le ministre de l’Intérieur et le chef des députés LR se démènent pour tenter de convaincre les derniers militants encore indécis. En toile de fond : la conquête du leadership à droite en vue de la présidentielle de 2027.
Alors que l’ancien patron de la région Auvergne-Rhône-Alpes, challenger de cette compétition interne, ne cesse de décocher des flèches à l’encontre du Vendéen dans l’espoir de combler son retard, le premier flic de France est bien décidé à rendre coup pour coup. Après que Laurent Wauquiez a exprimé ce dimanche dans Le Parisien sa crainte de voir, avec Bruno Retailleau comme patron de LR, la droite «se fondre petit à petit dans la macronie» et «renoncer à un candidat à la présidentielle au profit d’un candidat macroniste», la réponse de l’intéressé ne s’est pas fait attendre au «Grand Jury» RTL-Le Figaro-M6-Public Sénat : «Est-ce que j’ai une tête d’un candidat qui renoncerait à ce que ma famille politique renonce à cette clé de voûte de nos institutions, la présidentielle ?»
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Autre reproche formulé par Laurent Wauquiez : la possibilité que Bruno Retailleau finisse, d’ici à 2027, par rallier Édouard Philippe, à ce jour seul candidat déclaré du camp présidentiel à l’Élysée. «Qu’est-ce qu’il lui fait dire ça ?», a rétorqué le premier flic de France, prenant soin de se démarquer du maire du Havre (Seine-Maritime), lequel «croît encore», selon lui, à «la pérennité du bloc central». Partisan du clivage gauche-droite qu’il dit «voir revenir», le ministre de l’Intérieur juge que le «“en même temps”», cher au président de la République, est «une idée fausse» et «qu’il ne survivra pas à Emmanuel Macron». Une mise au point visant à couper court aux rumeurs d’un rapprochement futur avec l’ancien premier ministre (2017-2020). Fort de ses nombreux déplacements sur le terrain, Bruno Retailleau se montre catégorique : «La France ne penche ni à gauche, ni au centre, elle penche à droite». «C’est avec une ligne claire qu’on triomphera», a insisté le ministre, en prenant l’engagement que le parti «portera un candidat» à la présidentielle.
«Faire revenir» d’anciens électeurs
Face aux attaques répétées de son concurrent, qui estime que l’hôte de la place Beauvau ne devrait pas cumuler sa fonction gouvernementale avec la présidence de LR, au motif qu’il serait prisonnier, dans ses prises de position comme dans son action, de la solidarité gouvernementale et du premier ministre François Bayrou - Bruno Retailleau se défend : «Je suis le ministre de l’Intérieur à la parole la plus libre depuis, non pas des années, mais des décennies». Huit mois après son entrée au gouvernement, il revendique sa «marque de fabrique», le «parler vrai» : «C’est ma liberté, c’est ma force. C’est dire les choses telles que je les ressens telles que je les vois», a-t-il martelé. Comme pour rassurer les militants LR sensibles aux arguments de son rival, le ministre de l’Intérieur promet de ne jamais «abdiquer cette liberté», allant jusqu’à remettre, une nouvelle fois, sa démission dans la balance si on lui intimait de «se taire».
Tandis que Laurent Wauquiez plaide pour un «grand rassemblement de la droite» en vue de la présidentielle, allant du ministre de la Justice Gérald Darmanin à la seule eurodéputée Reconquête, Sarah Knafo, Bruno Retailleau préfère se tenir à distance des jeux partisans. «Ma droite, ce sera la droite qui va défendre les honnêtes gens. Ce n’est pas la droite d’une tambouille des appareils politiques», a-t-il affirmé dans l’objectif de «faire revenir» dans le giron des Républicains des électeurs partis vers Emmanuel Macron, Éric Zemmour, Marine Le Pen voire l’abstention.
Dans la dernière ligne droite de cette campagne pour la présidence de LR, marquée par une ambiance de «guerre froide» entre les deux prétendants, le favori des sondages cherche à apaiser les tensions. «On est dans la même famille politique, mais on n’a pas le même tempérament. La politique, ce sont des convictions, et une façon de les incarner, de mettre de la chair autour», a déclaré le ministre de l’Intérieur. À l’entendre, les adhérents LR ne sont pas appelés le week-end prochain à trancher entre deux lignes divergentes mais entre des manières d’«incarner» leurs idées.