« Un grand exercice d’esbroufe » : avec sa convention citoyenne sur le rythmes scolaires, Emmanuel Macron relègue les vraies urgences de l’école
Emmanuel Macron a eu une idée. Une urgence. Après celles sur le climat en 2019 puis sur la fin de vie en 2022, il a annoncé vendredi 2 mai que 2025 sera l’année d’une troisième convention citoyenne. Cette fois, les rythmes scolaires en seront le sujet. Censée s’ouvrir dès le mois de juin prochain, elle devrait durer « au moins jusqu’à l’automne », selon l’Élysée.
Sur le modèle des expériences précédentes, plusieurs dizaines de citoyens seraient donc amenés à se pencher sur le sujet et à formuler des propositions. L’organisation en sera confiée aux bons soins du Comité économique, social et environnemental (Cese) – un de ces organes de l’État que certains, sous le regard attendri du gouvernement, songent à supprimer par mesure d’économie…
Un « grand exercice d’esbroufe » sur le dos de l’école
Pour le chef de l’État, il s’agit de « faire en sorte que l’organisation des journées de nos élèves soit plus favorable à leur développement et aux apprentissages », et « qu’un équilibre soit trouvé aussi pour faciliter la vie des familles ». Ainsi, après la réforme contestée de 2012, les questions de la durée et de l’organisation des journées scolaires, du rythme des semaines, mais aussi du séquençage et de la durée des vacances scolaires seraient posées.
Pour « dégager des consensus » sur cette « question très complexe », Emmanuel Macron souhaite la participation de nombreux acteurs : « Les parents, la communauté éducative, y compris périscolaire, les collectivités locales et même les professionnels du tourisme. »
« La ficelle est grossière », a vertement réagi Sophie Vénétitay, cosecrétaire générale du Snes-FSU (principal syndicat du secondaire), interrogée sur France Inter. Qualifiant l’opération de « grand exercice d’esbroufe », elle a rappelé que « les véritables enjeux de l’école, les véritables urgences, c’est d’arriver à avoir assez de professeurs ».
Engluée dans ce qu’il est convenu d’appeler une « crise d’attractivité » qui s’aggrave d’année en année, « l’école est en train de s’effondrer », a martelé la syndicaliste. Salaires toujours indécents malgré des revalorisations très partielles dans la dernière période, conditions de travail de plus en plus dures, déconsidération sociale : l’école ne parvient plus à recruter et nombre de celles et ceux qui y exercent déjà veulent la quitter, alors que les départs à la retraite seront massifs dans les prochaines années. Un cercle vicieux qui concerne d’ailleurs tous les métiers de l’éducation nationale, et pas seulement les enseignants.
Le fâcheux précédent de la convention sur le climat
Côtés parents d’élèves, le n° 2 de la FCPE (Fédération des conseils de parents d’élèves), Grégoire Ensel, dont l’organisation a lancé en septembre dernier un appel à organiser une… convention citoyenne sur l’éducation (aux objectifs toutefois bien plus larges que ceux envisagés aujourd’hui), s’est montré prudent, insistant sur la nécessité que la démarche produise « des mesures concrètes ».
Chat échaudé craint l’eau froide : nul n’a oublié le peu de cas qu’Emmanuel Macron lui-même avait finalement fait des propositions issues de la convention citoyenne sur le climat. Le risque que ce nouvel épisode constitue une pure diversion est donc élevé. Notre école brûle, et les pyromanes eux-mêmes nous enjoignent de regarder ailleurs.
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