« Aucune impression de danger » : on a testé un robot-taxi et l’expérience est bluffante

Ce n’est pas une bonne nouvelle pour les chauffeurs de taxi et les VTC. À la veille de l’ouverture aux professionnels du salon automobile de Shanghai, la société Pony, l’un des trois acteurs mondiaux des robots-taxis avec Waymo et Apollo, a convié Le Figaro à essayer l’une des dernières versions de son système de conduite autonome. Avouons que nous étions un peu sceptiques avant de prendre place à l’arrière d’une Lexus RX400h bardée de lidars, de caméras et de capteurs. Force est de constater que le système est particulièrement abouti. Pendant un quart d’heure, il nous a été permis d’évoluer en toute sécurité dans le quartier Anting de Shanghai, où se joue une partie du futur de l’automobile avec la présence de nombreuses usines dont celle de la JV SAIC-Volkswagen, et notamment le futur de la voiture autonome.

C’est en 2016 que les deux ingénieurs chinois, Dr. Jun Peng et Dr. Tiancheng Lou, qui ont fait leurs classes aux États-Unis et plus particulièrement chez Google, ont décidé de se lancer sur le marché du véhicule autonome en fondant la société Pony. Aujourd’hui, la société a déjà 1000 véhicules en exploitation. Selon ses prévisions, 2000 véhicules seront mis en service l’an prochain. Une accélération est prévue en 2027-2028 avec l’arrivée de son système de huitième génération. À la fin de la décennie, Pony ambitionne de mettre en service 85.000 robots-taxis disposant d’une autonomie de niveau 4, c’est-à-dire sans chauffeur. Selon le porte-parole de Pony, la septième génération de son système, présentée au salon de Shanghai, et dotée d’un logiciel très performant est déjà « dix fois plus sécuritaire que l’homme ». La capacité de réaction est de l’ordre du millième de seconde.

La flotte de robots-taxis de la société Pony. Le Figaro

Les Chinois ont adopté les robotaxis

Actuellement, les robots-taxis autorisés à fonctionner dans certaines zones bien délimitées de Shanghai roulent 16 heures par jour et effectuent 18 courses par jour. Le prix d’une course est équivalent à celui d’un taxi classique mais les clients sont devenus adeptes de ces voitures reconnaissables à leur tourelle sur le toit. Cela évite d’être à la merci d’un chauffeur agressif ou qui conduit mal et met la vie des passagers en danger. En France, les robots-taxis éviteraient les comportements déviants de certains chauffeurs de VTC. Le nombre d’affaires de chauffeurs violents ou sous l’emprise de stupéfiants ne fait qu’augmenter.

Une conduite naturelle et douce

La Lexus RX sort ainsi de son emplacement et nous voici invités à prendre place aux places arrière, sans oublier de boucler sa ceinture. Après avoir vérifié qu’aucun obstacle n’obstruait son passage, la voiture quitte son emplacement. On peut suivre sur un écran la présence d’autres véhicules en approche et la couleur des feux de signalisation.

Personne au volant sur la route à 3 voies. Le Figaro

La Lexus sort de l’enceinte du bâtiment en mettant son clignotant. Dès les premiers mètres, l’absence de conducteur est déstabilisante. Notre véhicule accélère à une bonne allure pour se caler à près de 60 km/h sur une grande avenue à trois voies. Sur la gauche, un camion est immobilisé. Les lidars et caméras évaluent la situation. La Lexus ralentit un peu avant de passer le camion puis réaccélère. Elle mène bon rythme. La route oblique un peu : le volant effectue une légère correction. En douceur. À la prochaine intersection, le feu vient de passer au rouge. Il est prévu de faire demi-tour. Le système a tout enregistré.

Sur l’écran, les capteurs évaluent chaque situation rencontrée sur la route. Le Figaro

À l’approche du carrefour, la Lexus vérifie qu’aucun véhicule n’arrive derrière, met son clignotant, tourne le volant pour se placer sur la file de gauche et freine sans à-coups. C’est vert : le SUV japonais redémarre, vérifie que le champ est libre et effectue son demi-tour le plus naturellement du monde. Un peu plus loin, sur une artère dégagée, la Lexus pousse une pointe à 80 km/h. Elle maîtrise son sujet. À aucun moment nous n’avons l’impression d’être en danger. Retour chez Pony. Les Lexus vont se garer de manière autonome sur leur emplacement.

L’expérience est une révélatrice du fossé qui se creuse entre la Chine et l’Europe. Pendant que les Chinois sont passés aux travaux pratiques, le Vieux Continent en est toujours à réglementer. L’Europe va-t-elle se réveiller un jour ?