États-Unis : Steve Davis, le fidèle d'Elon Musk pour tronçonner l'État fédéral
Un tribunal fédéral a jugé, mardi 18 mars, que les mesures prises par Elon Musk et sa commission pour l'efficacité gouvernementale (DOGE) en vue de la suppression de l'agence américaine de développement, l'USAID, étaient "probablement" inconstitutionnelles. Ces actions "ont probablement violé la Constitution des États-Unis de multiples manières", a ainsi estimé un juge fédéral du Maryland, près de Washington.
Le président républicain Donald Trump a signé dès son retour au pouvoir, le 20 janvier, un décret ordonnant un gel de l'aide étrangère américaine pour 90 jours. L'homme d'affaires, qui avait promis pendant sa campagne de réduire le poids de l'État fédéral et de tailler dans les dépenses, a chargé son allié multimilliardaire Elon Musk de mettre en œuvre cette promesse.
Depuis, le patron de Tesla, SpaceX et X a lancé une vaste offensive destinée à réduire drastiquement les dépenses publiques, avec des méthodes décriées notamment par l'opposition démocrate et les syndicats, qui les jugent brutales et arbitraires.
À lire aussiCinq questions clés sur le DOGE, la commission d’Elon Musk qui opère une purge administrative
Un fidèle lieutenant
Pour mener à bien cette mission, Elon Musk s'appuie sur Steve Davis, l'un de ses plus fidèles lieutenants. Selon le New York Times, cet homme âgé de 45 ans est "devenu le véritable dirigeant de la DOGE". Pour le journal américain, il a "plus de pouvoir que l'administratrice par intérim" de cette commission pour l'efficacité gouvernementale, Amy Gleason.
Pour preuve, après l'investiture de Donald Trump, Steve Davis a insisté auprès des responsables de l'administration américaine pour qu'ils l'autorisent à envoyer un mail aux 2,4 millions de fonctionnaires simultanément. Dans ce message intitulé "Fork in the road", que l'on peut traduire par "À la croisé des chemins", il était indiqué que les employés fédéraux pouvaient soit rester dans l'administration et risquer d'être licenciés plus tard, soit partir dès maintenant avec des indemnités.
Steve Davis n'a pas été chargé de ce plan de départ volontaire par hasard. Depuis plus de 20 ans, il œuvre aux côtés d'Elon Musk. Comme le décrit le Wall Street Journal, cet ingénieur en aérospatial qui possède des diplômes de l'Université de Pennsylvanie et de Stanford, a été recruté en 2003 par SpaceX, l'une des sociétés du milliardaire. Engagé dans un premier temps dans des études de commerce, il a choisi cette voie après avoir vu le film Armageddon lors de sa sortie en 1998. "Mon chemin de vie a été réorienté par un film de Bruce Willis", avait-il ainsi résumé dans une interview en 2015.
Très vite, le jeune homme s'est fait remarquer par le patron de SpaceX en trouvant des moyens de réduire les coûts d'une pièce de fusée, passée de 120 000 dollars à 3 900 dollars. Mais comme le note The New York Times, "sa frugalité a entraîné des erreurs". En retirant en 2007 des composants de la fusée Falcon X de SpaceX, l'un des essais s'est soldé par un échec.
À lire aussiElon Musk défend son action à la tête du Doge tout en reconnaissant des "erreurs"
Des coupes à la hache
Malgré ce couac, Elon Musk l'a ensuite nommé directeur des projets avancés de SpaceX, puis en 2018 patron de la Boring Company, une start-up spécialisée dans la construction de tunnels souterrains visant à réduire les embouteillages. Steve Davis n'a pas rencontré beaucoup de succès dans cette entreprise. Embourbé dans des problèmes de permis de construire, il n'a mené à bien qu'un projet de tunnel à Las Vegas.
L'ingénieur en aérospatiale s'est finalement montré plus efficace lors du rachat de Twitter - renommé X - par Elon Musk en 2022. Comme le raconte le Los Angeles Times, il a largement contribué à la réduction de 500 millions de dollars de coûts annuels et de 80 % des effectifs, n'hésitant pas à licencier à tour de bras et à violer certaines réglementations. "Il a embrassé son travail avec une telle ferveur que pendant un certain temps, il a dormi dans les bureaux de Twitter avec sa compagne et leur nouveau-né", écrit le quotidien.
Mais comme le souligne le magazine Fortune, il "reste à savoir si les réductions de coûts de Davis sont rentables pour les entreprises dans lesquelles il les applique". "Il n'a travaillé que brièvement chez X, mais selon une estimation, sa valeur a chuté de 72 % depuis son rachat par Musk", note le magazine, qui ajoute que les "licenciements ont entrainé des problèmes techniques et une panne majeure".
À lire aussiDOGE : un tiers de l'équipe de Musk claque la porte pour protéger les services publics
Un patron impitoyable
Le comportement de Steve Davis semble aussi poser problème. Interrogés par Fortune, trois personnes ayant travaillé avec David le décrivent comme "impitoyable" ou "insensible", n'hésitant pas à appeler à toute heure du jour ou de la nuit ou refusant de reporter une réunion lorsque ses employés ont des impératifs familiaux. Dans une tribune publiée sur le site du magazine Rolling Stone, Adam Green, l'un de ses anciens amis, fait ainsi le portrait d'un "penseur amusant et original" devenu "le serviteur aveugle" d'Elon Musk.
Cette loyauté s'est poursuivie sur le terrain politique. Après l'épisode X, l'employé dévoué a participé à la campagne électorale de Donald Trump au sein du comité d'action politique (super PAC) d'Elon Musk, n'hésitant pas à déménager en Pennsylvanie. Homme de l'ombre, il évite "soigneusement d'attirer l'attention" comme l'explique le New York Times. Il existe ainsi très peu de clichés sur lesquels il apparait.
Mais après avoir été intégré à la commission pour l'efficacité gouvernementale (DOGE), l'acolyte d'Elon Musk attire désormais les regards. Ses anciens amis comme Adam Green ont en tout cas "le cœur brisé". Pour eux, cet homme "brillant et créatif" pourrait "améliorer la qualité de vie de millions de personnes". Mais en suivant aveuglément le patron de Tesla, il participe à un "jeu hors de contrôle" dont "les Américains sont les perdants".