The Waeve, City Lights (Transgressive)
L’an passé, le premier album de The Waeve révélait l’alchimie unique entre Rose Elinor Dougall et Graham Coxon, couple à la ville comme à la scène. On sait depuis longtemps que le guitariste de Blur est l’un des musiciens les plus intéressants de sa génération. Après une série d’albums régulièrement passionnants, le quinquagénaire a décidé de faire équipe avec la chanteuse des Pipettes. Ce deuxième volet de leurs aventures communes est encore plus réussi que le premier. La chanson titre, pétaradante, renvoie aux albums du Bowie de la fin des années 1970, la guitare de Coxon sonnant très proche de celle de Rober Fripp et un saxophone très Roxy Music. Mais il ne s’agit pas de la seule orientation de ce disque dense, érudit et diablement romantique à la fois. La musique du duo est très stylisée, qu’elle prenne sa source dans le folk anglais (on pense parfois à Richard & Linda Thompson) et le glam rock. La réalisation brillante de l’incontournable James Ford, collaborateur d’Arctic Monkeys, Fontaines DC, Gorillaz ou Depeche Mode, harmonise ces influences avec brio. Très anglophile, ce disque convoque le meilleur de la Grande-Bretagne d’avant le Brexit, qu’il évoque certaines de ses paroles. L’écriture des mélodies est très soignée, les climats variés, la tension ne baisse pas au long de l’album qui s’affirme déjà comme une des grandes réussites de l’année.
XTC, Skylarking (Louder)
Le hasard du calendrier veut que le nouvel album de The Waeve sorte le même jour que la réédition de Skylarking, album du groupe XTC, une des plus grandes influences de Blur. Initialement sorti en 1986, cet album a été le plus grand succès de la formation la plus sous-estimée de la pop anglaise post Beatles. De la brit pop dix ans avant que ce terme soit à la mode. Dans un monde idéal, Andy Partridge serait célébré pour sa contribution inestimable à l’écriture de chansons. Dans notre monde, l’homme suscite l’admiration inconditionnelle de ceux qui connaissent son travail et l’indifférence des autres, qui représentent hélas la majorité de la population terrestre. Le disque, réalisé par le démiurge américain Todd Rundgren, est aussi le chef-d’œuvre d’une carrière amorcée en 1977 et achevée à la fin du siècle dernier. Même si la collaboration entre deux fortes têtes comme Partridge et Rundgren a été notoirement difficile, elle aura abouti à un des disques pop les plus spectaculaires de la décennie. Cette nouvelle édition offre le single Dear God, une nouvelle pochette fidèle à la volonté initiale du groupe (la photo d’un pubis féminin fleuri) et un nouveau mix en Dolby Atmos effectué par Steven Wilson de Porcupine Tree. L’album a remarquablement vieilli pour une production de 1986, et les chansons conservent toute leur puissance mélodique, près de 40 ans plus tard. Un disque à redécouvrir d’urgence.