Jamais deux sans trois. Après Fitch et S&P, c'est au tour de l'agence de notation Moody's de se prononcer sur la notation de la dette souveraine de la France. L'organisme privé s'est exprimé vendredi 24 octobre, dans la soirée, et a décidé de maintenir la note Aa3 de la France, mais d'abaisser sa perspective de "stable" à "négative".
Les appréciations de ces trois principales agences, appelées "The Big Three" ("les trois grandes" en français), sont un indicateur pour établir la santé économique de chaque Etat. Pour décider de leur notation, elles évaluent notamment la croissance, la dette de l'Etat, le déficit budgétaire annuel, les dépenses, les recettes fiscales, mais aussi la stabilité politique et institutionnelle du pays.
Le système de notation est basé sur des lettres : la meilleure note possible est AAA, et la pire est D pour les pays en défaut de paiement. Ces notes peuvent être associées à une perspective (stable, positive ou négative) donnant la potentielle évolution de la note à moyen terme. Vous pouvez visualiser l'évolution de la note française depuis vingt ans dans le graphique qui suit, et voir le détail, semestre par semestre et agence par agence, en passant votre souris sur les courbes.
En janvier 2012, quelques mois avant l'élection présidentielle, la France a perdu son triple A, la meilleure note possible, durant la crise de la zone euro. Une première depuis 1975. Les agences de notation ont vécu des heures délicates au moment de la crise de subprimes (2007-2010) – du nom de ces fameux prêts immobiliers à haut risque – et ont été très critiquées pour ne pas avoir anticipé la situation désastreuse des crédits aux Etats-Unis. "Par effet de rétorsion, elles avaient été extrêmement dures au moment de la crise de la dette souveraine en Europe", analysait l'économiste Stéphanie Villers, conseillère au cabinet PwC France, en septembre pour franceinfo.
Note en baisse, taux d'emprunt en hausse
La suite, c'est une lente dégradation des notes de la France depuis treize ans : passée dans le AA, puis, récemment, dans le A. Fitch a en effet ouvert le bal le 12 septembre, en abaissant la note d'un cran, de AA- (dette de bonne qualité) à A+ (dette de qualité moyenne supérieure). L'agence S&P (ex-Standard & Poor's) s'est ensuite alignée en notant la France A+ avec "perspective stable", comme l'Espagne ou le Portugal.
Avec ces appréciations, les agences évaluent les capacités de remboursement d'une dette publique. En principe, plus la note est basse, plus les investisseurs seront tentés de réclamer un taux d'intérêt élevé pour prêter de l'argent, car faire crédit à cet Etat sera considéré comme plus risqué. Le taux d'emprunt de la France à dix ans (le plus important au regard de l’état des finances d’un pays) est désormais supérieur à 3%. Il a même dépassé, en septembre, celui de l'Italie, autrefois considérée comme une mauvais élève de la zone euro.
Pour autant, aucune déflagration n'a été remarquée à la suite des récentes dégradations de la note de la France. "Les marchés financiers ont déjà intégré l'instabilité politique. Les taux de la dette sont en train de progresser, la dégradation de la note ne fait que constater a posteriori ce que les marchés financiers ont déjà répercuté dans leurs cours", analysait en septembre Stéphanie Villers.