Budget 2026 : quand Philippe Juvin propose de donner «à titre gratuit» des HLM à leurs locataires

C’est un amendement qui a fait réagir les députés. Lors de l’examen du projet de la première partie du projet de loi de finances, cette semaine, le rapporteur général de la commission des finances de l’assemblée Nationale, Philippe Juvin, a mis sur la table une proposition qui «va sûrement surprendre». Constatant que les logements sociaux «ne connaissent pas ou peu de rotations» et qu’ils ne se vendent pas, le médecin des hôpitaux parisiens a proposé que les logements «soient remis à titre gratuit aux locataires», à certaines conditions.

Dans le détail, l’amendement 1853 conditionne le don à «20 ans d’occupation du logement social», un acquittement régulier des loyers et charges, ainsi qu’à l’absence de conflits de voisinage. Une fois ces conditions remplies, «on pourrait alors mettre en place le système de don dès lors que le bien est amorti», à condition que les occupants «conservent le bien pour une durée de 5 ans» avant d’en disposer comme bon leur semble, a plaidé l’élu. Un moyen, à ses yeux, «de rendre les Français propriétaires», et de créer un parcours résidentiel «qui n’existe pas».

Passer la publicité

Un amendement salué mais retoqué

Cette proposition a fait débat au sein de la commission. Guillaume Kasbarian, ex-ministre du Logement et député de la majorité présidentielle a jugé l’idée du rapporteur «très intéressant», tout en avouant ignorer comment cette mesure pourrait s’articuler avec les mécanismes existants de cession moyennant finance, ni comment les bailleurs réagiraient. Dans la même veine, Jean-Philippe Tanguy a estimé qu’il s’agissait d’un «amendement intéressant». François Jolivet, député Horizon & Indépendants, s’est interrogé quant à la conditionnalité du statut du locataire, notamment sur le sort des bénéficiaires d’aides au logement, qui pourraient ainsi acquérir un logement à très bas coût.

De son côté, la députée Modem Perrine Goulet s’est indignée que de telles offres puissent profiter à des personnes sans difficultés financières, qui louent des logements HLM à des montants supérieurs à la moyenne. Éric Coquerel, président de la commission, a pour sa part argumenté que cette proposition cherche à «dépasser le modèle du logement social» sans s’attaquer à la véritable source du problème : l’accès au logement. Enfin, le député socialiste Jacques Oberti a mis en garde contre les dérives potentielles, rappelant que si les bailleurs ont du mal à vendre après 20 ans, c’est parce que les logements «ne respectent plus les normes de rénovation». Or, cette mesure serait surtout un moyen pour les bailleurs sociaux «d’éviter d’assumer leurs responsabilités» : elle risquerait alors de se transformer en «cadeau empoisonné» pour les futurs propriétaires, qui devraient prendre ces travaux à leur charge.

In fine, l’amendement a été rejeté par les parlementaires, au terme des débats. Les discussions pourraient toutefois reprendre en séance publique, une fois le projet de budget parvenu dans l’hémicycle. Reste à voir si Philippe Juvin décidera alors de le présenter à nouveau, et si le vote changera alors.