Suspension de la réforme des retraites : Édouard Philippe juge la concession de Sébastien Lecornu aux socialistes «trop importante»
Deux jours après l’annonce du premier ministre d’interrompre le relèvement de l’âge légal de départ à la retraite, son prédécesseur a déclaré, ce jeudi soir sur France 2, que les députés Horizons s’opposeront à cette mesure lors des débats budgétaires.
Passer la publicité Passer la publicitéSans surprise, l’ancien premier ministre Édouard Philippe désapprouve la suspension de la réforme des retraites jusqu’à la présidentielle de 2027, annoncée cette semaine par son successeur, Sébastien Lecornu, au cours de son discours de politique générale. Peu lui importe, en somme, que ce geste à l’égard des socialistes ait été dicté par la crainte de les voir s’allier au reste de la gauche et au Rassemblement national lors de l’examen des motions de censure - lesquelles ont été rejetées ce jeudi matin. Le scénario inverse aurait aussitôt entraîné la chute de son équipe, quelques jours à peine après la formation laborieuse de sa deuxième mouture.
Pourquoi, dès lors, ne pas avoir encouragé ses troupes - estimant qu’une ligne rouge avait été franchie - , à censurer le gouvernement ? Sur France 2 ce 16 octobre, le maire du Havre (Seine-Maritime) a considéré qu’il n’était pas «incohérent» que les députés Horizons, issu du parti qu’il dirige, ne «mêlent pas leurs voix à deux formations qui veulent rétablir l’âge de départ à 62 voire à 60 ans», alors même qu’ils «ne sont d’accord sur rien avec LFI ou le RN s’agissant des retraites et du budget».
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Passer la publicitéUn comportement, justifié selon lui, par le «refus de la politique du pire et d’une idée simple : dès lors qu’il va y avoir un débat budgétaire, on peut lutter contre telle ou telle position.» Et de préciser à cet égard qu’une opposition à une mesure, «dans une démocratie», n’est pas synonyme de «censure» automatique. Reste qu’à quelques jours de l’ouverture des débats budgétaires à l’Assemblée nationale, la concession faite au nom de la stabilité gouvernementale est jugée «très importante, trop importante» aux yeux d’Édouard Philippe, persuadé que «nous allons devoir travailler plus longtemps si nous voulons sauver notre système de retraites».
«Ce n’est pas populaire»
Partisan d’un relèvement de l’âge légal de départ jusqu’à 67 ans et de l’introduction d’une dose de capitalisation - ce qui conduirait chacun à épargner pour assurer financièrement ses vieux jours -, le candidat déclaré à l’Élysée reste droit dans ses bottes : «Je ne vais pas changer d’avis. Je sais que ce n’est pas populaire, mais dire quelque chose quand on sait que ce n’est pas populaire, mais parce qu’on pense que c’est vrai, ça peut avoir un peu de valeur et un peu de crédit», a-t-il martelé. «Nous sommes en train de nous raconter des carabistouilles, de nous mentir» sur l’avenir des retraites, a-t-il poursuivi, soulignant que nos voisins européens ont petit à petit repoussé l’âge de départ pour répondre au «vieillissement démographique».
À l’orée de l’examen des textes budgétaires, qui commence ce lundi en commission à l’Assemblée nationale, l’ancien bras droit d’Alain Juppé promet que les députés Horizons «porteront leurs idées» au gré des débats et «contesteront» la suspension annoncée - et décriée dans le bloc central, tant la réforme des retraites faisait figure de totem intouchable en macronie. «Dès lors que les mesures proposées nous paraîtront aller dans le mauvais sens, nous les combattrons», s’est-il engagé, avant d’appeler les commentateurs de la vie politique à juger la «cohérence» d’Horizons : «Nous avons voté la confiance à François Bayrou unanimement et nous avons, concernant cette censure, refusé de la voter, unanimement.»
Interrogé sur son souhait de voir Emmanuel Macron mettre fin à son mandat après l’adoption du budget - une prise de position qui a fait couler beaucoup d’encre la semaine dernière, y compris dans son camp - , Édouard Philippe persiste et signe. Pour lui, le départ anticipé du président constituerait «la seule décision digne permettant d’éviter dix-huit mois» de «crise» politique et «d’indétermination», une période qui, assure-t-il, «se terminera mal».